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Ce que votre voix dit de vos habitudes tabagiques


Le LIH identifie un biomarqueur vocal du tabagisme

28 août 2024 4minutes

S’appuyant sur leur programme de recherche phare Colive Voice, les chercheurs du « Deep Digital Phenotyping Lab » du département de médecine de précision (DoPH) du LIH ont mis au point un nouveau biomarqueur vocal digital qui peut être utilisé dans la recherche clinique et épidémiologique pour évaluer le statut tabagique de manière rapide et précise à l’aide d’enregistrements audio. Cette technologie innovante permet de différencier les fumeurs des non-fumeurs avec une grande précision, indépendamment du sexe et de la langue parlée.


Le tabagisme est un problème majeur de santé publique à l’échelle mondiale et la principale cause évitable de maladie et de mortalité, étant responsable de plus de huit millions de morts par an, dont 1,3 million de non-fumeurs affectés par le tabagisme passif. Les effets négatifs du tabagisme sur la santé comprennent des problèmes immédiats, tels que le stress oxydatif, et des conséquences à long terme, comme la multiplication par 2 à 4 du risque de maladie coronarienne et d’accident vasculaire cérébral, le développement d’au moins 12 types de cancer et, en fin de compte, la mort de la moitié des personnes qui n’arrêtent pas de fumer. Pour ces raisons, le statut tabagique est l’une des principales variables évaluées dans la recherche clinique ou épidémiologique, par exemple lors du suivi de la réponse à un traitement. Cependant, les incohérences fréquentes, les lacunes dans les données et les informations biaisées nécessitent des méthodes supplémentaires pour évaluer objectivement ce facteur.

« Les caractéristiques vocales offrent un grand potentiel en tant qu’outil d’évaluation du statut tabagique. En effet, les fumeurs sont plus susceptibles de connaître des changements vocaux que les non-fumeurs, car le tabagisme affecte divers aspects de la fonction et de la qualité vocales », explique Hanin Ayadi du Deep Digital Phenotyping Lab au DoPH. « Nous avons donc cherché à analyser les effets de la fumée de tabac sur la voix et à mettre au point un biomarqueur vocal spécifique au sexe et à la langue pour l’identification automatique du statut tabagique », explique-t-elle.

L’équipe de recherche s’est appuyée sur des méthodes avancées d’analyse de données et d’intelligence artificielle pour analyser 3 996 enregistrements vocaux de 1 332 participants au programme de recherche phare Colive Voice. Les chercheurs ont noté que le tabagisme a des effets plus importants sur la voix féminine que sur la voix masculine. En effet, chez les femmes, le tabagisme abaisse la fréquence fondamentale de la voix, c’est-à-dire le nombre de fois par seconde où les cordes vocales vibrent lors de l’émission de sons vocaux, ainsi que le rapport harmonique-bruit moyen, une mesure qui quantifie la quantité de bruit dans le signal vocal, en plus d’autres caractéristiques associées à différentes qualités de voyelles dans les sons de la parole. Cela indique que le tabagisme affecte la résonance du conduit vocal et la bonne articulation. Au contraire, moins de différences entre fumeurs et non-fumeurs ont été observées chez les hommes. La plus grande vulnérabilité de la voix féminine à la fumée pourrait s’expliquer par des différences anatomiques et physiologiques entre les deux sexes, dont, pour les femmes, des cordes vocales plus courtes et des fluctuations hormonales plus importantes pouvant affecter le larynx, entre autres.

Par la suite, en combinant une série de caractéristiques vocales, les chercheurs ont réussi à prédire le statut tabagique avec une précision allant jusqu’à 72 % pour les femmes anglophones et jusqu’à 72 % pour les hommes francophones, fournissant ainsi un biomarqueur vocal spécifique au genre et à la langue pour distinguer les fumeurs de ceux qui n’ont jamais fumé. « En substance, nous avons démontré que l’effet du tabagisme sur la voix présente des disparités selon le sexe et la langue, ce dont nous avons tenu compte en élaborant différentes combinaisons de caractéristiques vocales pour mettre au point notre nouveau biomarqueur vocal », résume le Dr Guy Fagherazzi, directeur du DoPH et auteur correspondant de l’étude.

Notre travail jette les bases de l’identification automatique des habitudes tabagiques à partir de la voix enregistrée en situation réelle, ce qui constitue un moyen efficace, non
invasif et peu coûteux de surveiller cette pratique malsaine dans le cadre d’études cliniques et épidémiologiques,

conclut-il.

L’étude a été publiée dans la revue « Digital Biomarkers » sous le titre complet « Digital vocal biomarker of smoking status using ecological audio recordings: results from the Colive Voice study ».

Scientific Contact

  • Guy
    Fagherazzi
    Director, Department of Precision Health

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